« Roméo et Juliette » débarquent à Hammamet
Dix huit danseurs sur scène et une chaleur humaine de corps qui se délient s’adonnant à des mouvements de chair qui s’extasie. Toute la vivacité de la danse contemporaine est là. L’amour exalté et tragique tel qu’exprimé dans l’œuvre originale est là, tout comme l’histoire de ces deux amoureux qui se déchirent dans une relation passionnelle, obsessionnelle à en mourir. Un amour, comme on aime, qui sape et happe les esprits.
« Roméo et Juliette », la création du Ballet de l’Opéra de Tunis a été donnée au festival international de Hammamet au grand plaisir des amoureux de cette œuvre shakespearienne qui continue d’inspirer plus d’un.
L’adaptation tunisienne de « Roméo et Juliette » ,ce must de la littérature universelle et qu’on a vu se produire depuis presqu’un an, est à la hauteur de l’oeuvre shakespearienne qui nous fait entrer dans un monde au parfum charnel et d’innocences mêlées d’ un amour interdit par les convenances sociales.
Dans la première partie du spectacle, les danseurs arborent des tenues d’époque, comme sorties d’un livre shakespearien, tout comme, les personnages de l’œuvre théâtrale notamment Roméo, Juliette, la nourrice et Paris, les amis des deux personnages principaux et leurs familles respectives qui se livrent à des querelles sans fin. Dansant par deux, en solo, ou en mouvements d’ensemble, ils multiplient les tableaux chorégraphiés qui dans cette partie du spectacle, tiennent dans leur essence aux codes de la danse classique, dosée à souhait et rappelant le faste des bals mondains et le luxe de la vie de cour qui plaisait à ceux qui la fréquentaient. Certainement pas à Juliette qui choisit d’aimer une personne n’appartenant pas à sa classe sociale, s’attirant ainsi les foudres de sa famille. Et là il faut saluer, le choix des danseurs. Le personnage de Juliette est porté sur scène par une danseuse, une ‘’bella signorina’’ qui avec sa robe blanche vaporeuse et sa longue chevelure aérienne incarne bien son rôle d’une jeune femme à peine sortie de l’enfance. Les supplices de la nourrice n’ont pas suffi pour raisonner la jeune Juliette qui refuse le mariage avec Paris et décide de s’empoisonner. Eh oui, c’est ça l’amour et ses feux ardents qui brûlent tous ceux qui s’y approchent… ‘’Bellissimo’’.
Danse free style
Changement de rythme. La mort de Juliette constitue une sorte d’amorce à l’ensemble. Des sons de cloche retentissent … Un vacarme suit et une musique stridente accompagne un enchevêtrement de corps… D’anciennes querelles entre entités rivales explosent et se traduisent sur scène par des danseurs qui se livrent à des batailles rangées imagées et traduites en tableaux où s’apparentent des ombres qui se trémoussent et se meuvent dans l’obscurité d’une scène qui retrouve son côté tragique si cher au théâtre et à la danse théâtralisée.
Les mouvements d’ensemble synchrones se soldent dans de belles envolées scéniques, de mouvements aériens et raffinés… La chorégraphie donne aussi toute sa place à des individualités, à des danses en solo où les artistes montrent des performances hip hop, free style, ou encore contemporaine recherchant l’essentiel de son expression dans un travail au sol, exigeant fluidité et mouvements de grande technicité. Les cubes comme objets faisant partie de la chorégraphie et dont les bords sont lumineux et apparents, lui confèrent tantôt du mouvement tantôt son côté statique voulu.‘’Bravissimo !’’.
La fin de la tragédie
« Roméo et Juliette » le texte du répertoire universel dans sa mouture tunisienne est un spectacle de haute facture, digne du legs shakespearien pour l’humanité, qui plus est, déridé car injecté d’un pur sang tunisien, celui d’une jeunesse qui se meuve, danse et se surpasse et qui n’attend que ce genre d’opportunités pour briller. La fin tragique de l’histoire du spectacle, on la connait tous… Des cadavres jonchés à même le sol, attestant toujours et encore de la bêtise humaine et de ses multiples apories. Rappelons que cette mouture de l’oeuvre shakespearienne est signée de la griffe du chorégraphe italien Luca Bruni assisté par Maria Olga Palliani et Veronica Nieddu et réunit sur scène dix huit jeunes danseurs tunisiens. Le décor et les costumes sont conçus par le scénographe Mario Ferrari. La musique est un mélange dosé de l’ œuvre du répertoire classique de Sergi Prokofiev et d’ une composition originale de Marco Schiavoni.
Mona BEN GAMRA